La question de l’éligibilité des projets de Captage et Séquestration de Carbone (CCS) au Mécanisme de Développement Propre (MDP) a été ouverte dans le cadre du SBSTA aujourd’hui. ECO attendait avec une certaine curiosité comment ses défenseurs les plus acharnés allaient expliquer les « dernières tendances » du secteur ces derniers mois, telles que la multiplication d’abandons de projets au Royaume Uni, Allemagne, Pays-Bas, Danemark, Finlande, Australie et USA.
Entre autre, il y a eu ce conflit entre ScottishPower et Shell d’un côté, le Trésor britannique de l’autre, parce que les premiers exigeaient une augmentation des financements publics de 1.5 milliard de livres sterling, pour la construction d’une centrale thermique au charbon avec CCS. De son côté, le gouvernement australien a dû batailler sur le front juridique pour récupérer une partie de l’investissement public englouti dans un projet avorté, qui devait constituer la vitrine du CCS dans ce pays. La société norvégienne spécialisée dans le CCS, Aker Clean Carbon, a fait faillite ce mois-ci, son PDG déclarant que le marché avait disparu. Quant à l’UE, elle est à des années lumières de son objectif de réaliser 12 projets CCS innovants en 2015.
Pourtant, ici à Durban, les lobbyistes de l’industrie n’ont pas remisé leurs slogans de représentants de commerce : le CCS est une importante technologie d’atténuation, qui contribuera au développement durable des PED, fournira de l’électricité aux plus pauvres, et surtout, les pays les plus allants recevront une belle part du gâteau des MDP… Et ECO constate qu’à défaut de capter du carbone, ils parviennent à capter l’imagination de nombreux pollueurs…
Mais il se trouve qu’ECO connaît deux ou trois choses à propos du CCS que l’industrie n’a pas très envie de vous dire.
Contrairement à d’autres projets MDP, le CCS ne crée pratiquement pas de valeur ajoutée dans les pays hôtes. Le CCS est extrêmement consommateur d’énergie, nécessitant jusqu’à 40% de charbon supplémentaire pour capturer le CO2, ce qui, du coup, fait grimper le prix de l’électricité de 91% d’après le Massachusetts Institute of Technology. Le CCS entraîne la création de sites de séquestration qui vont devoir être soigneusement (et chèrement) surveillés et entretenus pendant des décennies, voire des siècles, bien au-delà de la période d’utilisation des crédits et d’encaissement des profits pour l’investisseur. D’ailleurs, les pays hôtes doivent assumer la totale responsabilité des déchets du CCS, prenant le relai de la compagnie tout juste 20 ans après la fermeture du site.
Dans le World Energy Outlook 2011, l’IEA prévoit que 1% seulement de la capacité installée en combustibles fossiles sera équipée en CCS d’ici 2035. En d’autres mots, le CCS est insignifiant en matière d’atténuation.
Le CCS dans le MDP, cela signifie l’exportation de technologies risquées et non éprouvées vers les pays en développement, en jouant sur l’illusion qu’une solution climatique existerait aujourd’hui qui justifierait la prolifération des centrales au charbon. Ce qu’ECO voit ici à Durban, c’est une industrie en faillite, qui recherche désespérément auprès des PED une légitimité qu’elle n’a pas su gagner dans les pays de l’Annexe I.
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