vendredi 30 novembre 2012

Agroécologie : une solution contre les changements climatiques

Depuis la COP17 à Durban, les négociateurs débattent de l’opportunité d’un programme de travail du SBSTA sur « Agriculture et climat » : le contenu de ce programme est l’objet de toutes les spéculations.
Face à la multitude des solutions mises en avant, et à la diversité des intérêts des acteurs qui les portent, il convient de se poser la question : « Quels modèles agricoles veut-on promouvoir ? ».
L’agriculture industrielle, sur laquelle se concentrent encore les efforts d’investissement, a démontré ses limites pour la gestion de l’environnement ; et c’est un leurre de penser qu’elle pourra jamais répondre à l’enjeu complexe de la sécurité alimentaire des ménages ruraux du Sud.
L’agroécologie, en revanche, constitue une solution d’avenir au triple défi de la sécurité alimentaire, de l’adaptation aux aléas et de la sobriété carbone. Elle vise la mise en place de systèmes productifs valorisant au mieux les ressources locales, avec un recours minimal aux intrants chimique. Les techniques sont orientées vers la préservation et la restauration du milieu – sol, eau et biodiversité. Elles concourent à une meilleure résilience des exploitations familiales aux aléas du climat : les exploitations sont plus diversifiées, moins dépendantes des approvisionnements extérieurs, et le pouvoir tampon du milieu est restauré et utilisé.
L’agroécologie s’inspire des techniques traditionnelles des paysans et des connaissances scientifiques. Ainsi au Burkina Faso, le zaï mécanisé est une amélioration de la pratique manuelle du zaï (creusement de micro-bassins autour du semis) qui permet la rétention d’eau et de fumure autour des racines. A Madagascar, les Systèmes de Riziculture Intensive permettent d’améliorer la productivité et d’économiser les ressources en eau, tout en limitant les émissions de méthane. L’agroforesterie, comme dans les jardins créoles traditionnels en Haïti, permet de valoriser différents étages de production; d’améliorer la productivité et de stocker du carbone.Les travaux de capitalisation d’Agronomes et Vétérinaires Sans Frontières  ainsi que du Groupe de Travail Désertification  donnent de multiples autres exemples.
Comment accompagner les changements nécessaires ?

Ces approches et pratiques sont mises en œuvre depuis longtemps sur tous les continents dans des contextes très divers, et le plus souvent dans le cadre d’agricultures familiales. Elles sont de plus en plus reconnues dans la sphère publique ; Olivier de Schutter, rapporteur spécial des Nations Unies pour le droit à l’alimentation, a écrit plusieurs rapports à ce sujet et souligne dans un communiqué de presse de 2010 que « Pour nourrir le monde, l’agroécologie surpasse l’agriculture industrielle à grande échelle » . Pour créer les conditions favorables à une généralisation de ces pratiques, il faut investir dans des politiques publiques engagées, dans l’amélioration et la diffusion des connaissances sur ces systèmes ; et agir pour une amélioration du contexte de production en agriculture familiale : sécurisation de l’accès à l’eau et au foncier, infrastructures, débouchés…

Dans la jungle des intérêts divers orientant les positionnements à la COP, espérons que les négociateurs poseront ce choix clair de promouvoir d’abord une agriculture accessible aux plus pauvres et respectueuse de l’environnement. Les ONG de Coordination SUD présentes à Doha, qui suivront particulièrement le volet « Agriculture » de la négociation, continueront à plaider dans ce sens .

Agronomes et vétérinaires sans frontière (AVSF) et le Centre d’Actions et de Réalisations Internationales (CARI)

Taxons le transport maritime pour financer la lutte contre le changement climatique !

La Banque Mondiale estime les besoins en matière d’adaptation pour l’Afrique subsaharienne à 18 milliards US$ par an. Et la Banque Mondiale estime toujours à la baisse.
Pour faire face à ses besoins croissants d’adaptation et de développement sobre en carbone, l’Afrique a besoin de financements nouveaux, additionnels, prévisibles, publics et suffisants. Toutes les analyses s’accordent pour dire que la lutte contre les changements climatiques dans les pays les plus pauvres, notamment pour financer les programmes non-rentables mais essentiels à l’adaptation des populations, coûtera très cher à la communauté internationale et exigera un effort exceptionnel en matière de finance public.
C’est dans cette logique que s’inscrit l’engagement pris par les pays développés à Copenhague de mobiliser 100 milliards US$ par an d’ici 2020.
Mais quelques années plus tard, les pays développés misent sur la crise financière et économique et le pathos pour échapper à leurs engagements financiers. Oui, les budgets publics sont en difficulté mais la vraie difficulté, c’est la mauvaise foi historique des pays développés en matière d’aide publique pour le développement.
Les financements précoces déboursés pour le climat entre 2010 et 2012 n’ont pas échappé aux exercices classiques de triche comptable, illustrant une énième fois la précarité, l’iniquité et l’imprévisibilité des financements de solidarité.
Dans ce contexte, il est impératif d’identifier de nouvelles sources publiques de financements pour abonder les budgets et les fonds internationaux à hauteur des besoins. Parmi ces sources, la société civile et un certain nombre de rapports internationaux - produits par le FMI et la Banque Mondiale, le philanthrope Bill Gates et tout récemment, les négociateurs de la CCNUCC - ont identifié la taxation du transport maritime et aérien international comme une source prometteuse de financement pour le climat. Pourquoi ? Parce que le transport maritime est un secteur d’activité de plus en plus émetteur de GES. Comment ? En créant un mécanisme de micro-taxation sur les émissions ou la consommation de fioul des bateaux, et en redistribuant les recettes au Fonds Vert et aux pays les plus pauvres pour compenser l’impact économique de la micro-taxe sur leurs consommateurs vulnérables.
La COP18 doit envoyer un signal très ferme à l’Organisation Maritime Internationale soutenant la création d’une taxe qui devra respecter l’équité entre les pays via un mécanisme de compensation, rediriger les recettes vers le Fonds Vert et réduire drastiquement les émissions du secteur. Mais ce signal ne sera suffisamment pas ambitieux et équitable sans le soutien et le leadership du Groupe Afrique !

Maiga Mahamadou FARKA,
Amade Pelcode Mali et
Alix Mazounie

Dr. Norvège & Mr. Norvège

Alors que la Norvège dépense des millions de dollars dans en protection de forêts tropicales et en énergies renouvelables dans les pays en développement, de nouvelles données montrent que la Norvège est loin d’avoir atteint ses objectifs nationaux.

Le pays a été applaudi pour utiliser son impôt sur les recettes du pétrole pour financer REDD + et les projets MDP ainsi que l’APD. Toutefois, cela est en contraste frappant avec les nouveaux chiffres de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), montrant que les émissions domestiques ont augmenté de façon spectaculaire.

Bård Vegar Solhjell, ministre norvégien de l’environnement, arrivera à Doha la semaine prochaine pour présenter des objectifs ambitieux dans la lutte contre le changement climatique: une réduction de 20% des émissions nationales de gaz à effet de serre d’ici 2020, un engagement de 500 millions de dollars par an dédié à la protection forêt tropicale des fonds pour la promotion des énergies renouvelables dans les pays en développement ainsi que plusieurs millions de dollars pour l’adaptation.

Toutefois, les données de l’AIE ternissent l’image de super-héros environnemental de la Norvège. Les émissions norvégiennes de CO2 issues de la combustion du carburant ont augmenté de 38% depuis 1990, plus que tous les autres pays de l’OCDE hors Australie.
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- Suite de l’article  «Dr. Norvège ....»
Plus inquiétant encore, les projections d’émissions d’ici 2020 montrent que ces chiffres ne cessent d’augmenter.

La raison de cette hausse est que les émissions provenant de l’extraction et de la consommation de pétrole et de gaz ont augmenté de façon spectaculaire. Cependant, dans le même temps, l’industrie onshore a réduit ses émissions de gaz à effet de serre.

Cette évolution va sérieusement écorner la réputation de la Norvège en matière d’environnement.
Si la Norvège ne veut pas être considérée comme un pays schizophrène - qui fait d’ambitieuses déclarations lors des conférences internationales au sujet de leur engagement global mais fait preuve d’une tout autre ambition à la maison, elle devrait bientôt prendre des mesures audacieuses sur la réduction de ses émissions de CO2 domestiques.

Fossile du Jour

La première place revient à la Nouvelle Zélande et aux Etats-Unis pour avoir refusé de pousser les règles de comptabilisation communes ici à Doha. ECO a été choqué par la réaction de la Nouvelle-Zélande au groupe de travail informel 1(b)(i). Ses représentants ont eu le culot de déclarer que les pays ne tomberaient pas d’accord sur les règles de comptabilisation communes à Doha et qu’il serait pragmatique de continuer à discuter. Oh Nouvelle Zélande, si seulement les choses étaient aussi simples en matière de changements climatiques ! Nous sommes tous conscients comme l’ouragan Sandy nous l’a violemment rappelé que les changements climatiques ne se soumettent à aucun gouvernement. Ce qui fait que l’approche pragmatique aboutirait en fait à admettre qu’une tonne est une tonne et que tout ça doit être réduit. Cela fait longtemps que les Etats-Unis n’ont pas changé d’avis sur le sujet et la réunion d’aujourd’hui n’a pas été une surprise. Mais comme l’Afrique du Sud nous l’a gentiment rappelé cela ne suffit plus de faire référence au système comme quelque chose de « rigoureux, solide et transparent », il nous faut vraiment se mettre d’accord sur comment obtenir que les choses se fassent. Il est temps de se mettre au travail !

Le Canada remporte le deuxième fossile du jour. Quand allez-vous laisser souffler les fossiles ? Vous avez échoué à Kyoto, vous vous êtes couvert de ridicule sur la réduction des impacts du climat mais on dirait que cela ne vous suffit pas et que vous voulez en plus toucher le fond en finance. Vous avez gagné le premier fossile il y a deux jours en refusant d’abonder d’avantage le Fonds Vert et nous avons maintenant confirmation que vous vous désolidarisez de ce qui était convenu en ce qui concerne les aides aux NAMAs.
En rompant, comme vous l’avez indiqué hier au SBI, avec l’engagement de donner des informations sur les aides disponibles pour NAMA, vous ne vous contentez pas de rompre une promesse, vous détruisez la confiance.
Cher Canada, il est vrai que cela fait longtemps que nous n’avons plus d’illusions en ce qui vous concerne mais il nous restait l’espoir que même si vous vouliez rien faire pour vos propres émissions, vous tenteriez au moins d’aider ceux qui souffrent de votre pollution galopante.

Quel genre de délégué(e) êtes-vous ?

L’histoire est-elle en train de se répéter, ou y a-t-il vraiment un engagement fort sur l’égalité des genres sur la table ? Lors de la consultation d’hier dans le cadre du SBI agenda 21 (autres sujets), l’UE a introduit une proposition de décision qui promeut l’égalité des genres dans le processus de négociation climat de l’ONU. Le brouillon de la proposition, Promouvoir l’égalité des genres en améliorant la participation des femmes dans les négociations de la CCNUCC et dans la représentation des Parties par des organisations établies conformément à la Convention Cadre des Nations Unies sur le Changement Climatique ou au Protocole de Kyoto, est en fait une ré-affirmation et un renforcement d’une décision prise il y a déjà plus de dix ans. Lors de la COP7 à Marrakech, les Parties s’étaient accordées pour adopter la Décision 36/CP.7 qui reconnaissait l’importance de l’égalité des genres dans la prise de décision sur le climat, qui poussait les parties à nominer des femmes aux positions élues de la CCNUCC et qui demandait au Secrétariat de donner des informations sur la composition homme/femme des organisations de la CCNUCC comportant des postes élus.

Malgré cette décision, la participation des femmes dans les organisations de la CCNUCC et en tant que déléguées de Parties est globalement restée désespérément basse. Gardant cela en tête, la délégation de l’UE a soumis cette nouvelle décision pour rappeler aux participants de la COP l’importance de l’égalité des genre. Sur de nombreux aspects, l’ancienne proposition est similaire à la première : elle reconnaît l’importance de la participation des femmes comme l’un des aspects d’une politique climatique équitable et efficace, elle demande au Secrétariat de donner des informations sur la participation des femmes dans les conférences et elle fixe un objectif d’équilibre hommes/femmes dans l’ensemble des organisations de la CCNUCC.

Quel est donc l’objectif de cette décision, à part celui de rappeler à la session plénière ce qu’elle sait (normalement) déjà ? Premièrement, il est important de noter que lorsque cette décision a été présentée aux Parties, elle été introduite sous
« tout autre sujet ». Ceci veut dire que l’on n’accordait pas de place spécifique aux besoins et préoccupations de la moitié de la population du globe dans l’agenda central de la COP.

L’adoption de cette décision placerait la question genre & changements climatiques à l’ordre du jour de la COP, alors que la question des intérêts des femmes est plutôt considérée comme auxiliaire aux objectifs de la CCNUCC. Deuxièmement, la décision requiert du secrétariat d’organiser un atelier dédié, à la COP 19, pour faire émerger des politiques et des stratégies aptes à promouvoir l’égalité des genres dans le processus d’élaboration des décisions. Enfin, les parties et les organisations observatrices devront  soumette d’ici le 31 septembre 2013, leurs propositions pour atteindre cet objectif.
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- Suite de l’article  «Quel genre de ....»
Les parties (notamment le Bangladesh, le Ghana, l’Islande, l’Inde, le Malawi, le Mexique, le Népal, le Pakistan, les Emirats Arabes Unis, et les Etats-Unis) ont exprimé leur soutien ainsi que des modifications du texte dans le cadre de la consultation à participation ouverte co-pilotée par
Kuni Shimada (Japon) et l’ambassadeur M. Diseko (Afrique du Sud) . La commission sur les genres proposait de remplacer le mot « par » par le terme « et » dans la version du titre de la décision. Un amendement qui semble à première vue anodin mais qui en réalité, reconnaitra un droit procédural aux femmes de participer de façon égale, tout en permettant que le respect de l’égalité des genres dans les résultats des décisions de la CCNUCC soit reconnu comme un objectif à part entière.  La commission sur les genres a également proposé de renforcer le paragraphe qui exige l’organisation un atelier en session, en effaçant les éléments du paragraphe qui conditionnait la tenue de cet atelier à la «disponibilité des ressources.»

La décision de Marrakech avait émergé alors que le débat sur les questions des femmes et des genres étaient focalisées sur l’absence quasi totale des femmes dans le processus. La nouvelle décision va donc compenser ce fossé. Nous avons effectué des progrès considérables depuis pour que l’égalité des genres soit reconnue, au-delà même de la question de leur participation au processus d’élaboration des décisions. Les résultats des seizième et dix-septième COP intégraient des éléments sur différentes problématiques propres aux moyens d’existences des hommes et des femmes . La décision de remplacer le mot «par» par le mot «et» qui en passe d’être adoptée résoudrait alors les lacunes actuelles sur les droits procéduraux des femmes. Mais elle ouvre également la voie à des discussions sur les moyens de promouvoir l’égalité des genres dans les résultats, telle que l’ont ébauché les COP 16 et 17.

C’est très clair : il n’y a pas assez d’ambition

ECO se demande si les Parties ont besoin de lunettes ? LE PNUE et la Banque mondiale, parmi d’autres ont estimé que bien qu’il y ait toujours une chance de maintenir la hausse des température à 2°C, nous ne sommes toujours sur les bases d’empêcher un dangereux changement climatique.

Alors où en sommes nous à ce sujet et  se mettre d’accord sur la marche à suivre en terme d’atténuation ? Et bien, le groupe de l’Ombrelle semble nous dire qu’il n’y a pas lieu de s’inquiéter puisque qu’ils font des progrès : ils ont une proposition de nouvelle procédure !
Oui, le groupe de l’Ombrelle propose de clarifier les engagements sous le 1(b)(i) et ont suggéré un programme sur deux an pour le faire.

ECO aimerait clarifier un ou deux points de cette proposition. Vous dites que vous avez besoin de temps pour parler ? Et qu’il n’y aura aucun accord sur des règles de comptabilisation commune ici ?
A coup sûr, un peu de comptabilisation commune sous le 1(b)(i) permettrait d’y voir plus clair pour comparer les efforts. Il suffit de définir le budget carbone pour 2020. Si vous pensez qu’il n’y a pas besoin de comparer des pommes et des oranges, vous pourriez peut-être  vous contenter de les compter ?

Et un petit conseil - nous avons un moyen éprouvé pour comparer les engagements - vous savez, sous le Protocole de Kyoto... Et là, ça permettrait à chacun de savoir de quoi il retourne précisément.  Si le groupe de l’Ombrelle signait, ça réglerait la question de l’éligibilité.

 Voilà qui serait aider chacun à comprendre de quoi il s’agit. Et si le Groupe Parapluie signé alors ce serait trier la question de l’admissibilité trop.

A ce stade, quelques lignes d’une chanson me reviennent en tête : a little less conversation, a little more action please.

C’est ce que nous devrions tous chanter

jeudi 29 novembre 2012

Accès à l’énergie pour tous, le mythe de Sisyphe Africain ?

L’Afrique cherche toujours sa solution pour faire face à un double défi : donner accès à l’énergie à l’ensemble de ses populations tout en anticipant la finitude des ressources fossiles et l’impact croissant des changements climatiques.
La pauvreté, insécurité et précarité énergétique qui caractérisent le continent conditionnent sa croissance et influencent son développement. La demande d’énergie en Afrique n’est pas satisfaite et freine le développement économique, la création d’entreprises et d’emploi, l’accès à l’éducation et aux systèmes de santé performants. Pire, une grande partie des communautés n’ont toujours pas accès à l’électricité pour leurs besoins vitaux. Peut être parce que dans les dernières décennies, les choix énergétiques sur le continent donnent la priorité aux énergies fossiles – charbon et pétrole - qui contribuent à dégrader l’environnement, à renforcer la pauvreté énergétique et ne permettent pas de faire face aux changements climatiques.
Pourtant les sources ne manquent pas sur le continent, et le potentiel est infini pour répondre aux besoins énergétiques de l’Afrique et même au-delà. C’est pour faire face à ce défi que les ONG se sont mobilisées à Rio+20 pour proposer des solutions: les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique!
Energie pour tous ou Energy for all, ce slogan devenu le credo de toutes les institutions trouvera-t-il exécuteur, dans un monde de plus en plus aveugle aux sources d’énergies les moins polluantes, les plus sobre en carbone mais entreprenant pour le gaz de schiste ?
Pour les sables bitumineux ? De plus en plus aveugle aussi aux besoins des plus vulnérables.
En route vers Rio, la société civile a exprimé les préoccupations quotidiennes des communautés vulnérables ! Ces attentes se déclinaient en : droit à l’énergie durable pour les communautés ; indépendance vis-à-vis des énergies fossiles ; promotion des politiques d’efficacité énergétique ; réformes et gouvernance amélioré dans la gestion énergétique. Loin du compte, Rio a préféré l’économie verte, le capitalisme, les entreprises privées, les multinationales, sans oublier les ressources pétrolières et bientôt finies.
Si l’Afrique continue d’affirmer qu’il faut tirer profit du soleil, pour lutter efficacement contre les changements climatiques et garantir un développement durable et sobre en carbone, les projets sont insuffisants pour changer la trajectoire de développement. La politique régionale en matière d’énergie renouvelables de la CEDEAO promet une politique du changement mais les acteurs sont-ils assez forts pour faire le choix difficile entre retour rapide sur investissement et la survie, sur le plus long terme, de millions d’Africains dans un contexte de réchauffement climatique et de ressources finies.

Ange David Emmanuel Baimey
Réseau Climat & Développement
www.climatedevelopment.org

Lancer les travaux du chantier « 2°C » de l’ADP

C’est avec un certain optimisme que ECO rejoint la table ronde du chantier n°2 de la Plate-Forme de Durban (ADP) - ou «Chantier 2°C», selon la formule d’un négociateur entrant dans la salle de réunion. Toutes les Parties ont noté avec inquiétude à Durban le fossé de l’ambition avant 2020 pré-2020, et après un an sans aucun progrès, Doha semble être le moment de se mettre au travail.

Cependant, les Etats-Unis n’ont pas commencé les discussions du bon pied. Ils ont d’abord expliqué comment leur incapacité à adopter une législation nationale sur le climat (qui, selon le négociateur américain, aurait reposé pour moitié sur les crédits de compensation internationaux, allez savoir comment) constitue un doublement de leur ambition car ils doivent maintenant réaliser ces réductions d’émissions entièrement sur leur territoire. Le problème, c’est que malgré ce relèvement du niveau d’effort national, l’atmosphère ne perdra pas une tonne de carbone supplémentaire.
ECO a bien aimé l’approche du négociateur représentant l’Ethiopie, pays qui a l’ambition de devenir neutre en terme de CO2 d’ici 2025 - un engagement qui n’a pas été perçu comme trop ambitieux - si le soutien nécessaire se concrétiserait.
ECO rejoint les positions des pays en développement qui ont fait remarquer qu’une grande partie du travail pour accroître l’ambition doit se faire en dehors de l’ADP : finaliser les travaux du PK et du LCA avant qu’ils ne ferment ; atteindre le niveau d’ambition le plus élevé possible (notamment en se débarrassant de l’air chaud) dans le cadre de la 2e période d’engagement et au-delà ; et adopter un cadre commun de comptabilisation pour les pays développés qui ne font pas partie de la 2e période du Protocole (les passagers clandestins et ceux qui ont quitté le navire), afin d’assurer la comparabilité des efforts.

ECO a remarqué que les pays mettaient l’accent de manière suspecte sur ce qui est souvent désigné comme les « activités complémentaires ». Soyons clairs : les activités, initiatives ou mesures qui peuvent réduire les émissions de CO2 ou d’autres GES sont les bienvenues, y compris celles situées à l’extérieur du cadre de la CCNUCC. Il s’agit notamment des mesures visant à réduire les HFC (via le Protocole de Montréal), le noir de carbone (black carbone), les émissions liées aux carburants des soutes internationales (pour lesquelles des mécanismes peuvent être conçus générant au passage des financements Climat), et des actions visant à éliminer progressivement les subventions aux énergies fossiles (mentionné à quelques reprises lors de la table ronde, elles représentent un potentiel de réduction de l’ordre de 2 Gt). Mais ces activités, devront s’ajouter aux engagements existants et ne peuvent pas être utilisées comme moyens de les mettre en œuvre. Sans additionnalité, le fossé de l’ambition ne sera pas réduit
.
Par ailleurs, toutes ces mesures n’ont pas le même effet à long terme. La réduction des polluants climatiques à courte durée de vie peut contribuer à l’effort, mais son effet sera de plus courte durée (comme leur nom l’indique) et ne peut constituer un substitut à une action sur les polluants climatiques de long terme, tels que le dioxyde de carbone. Comme suggéré par certains pays, on peut envisager des soumissions et des documents techniques visant à analyser l’ensemble de ces options, y compris leur chevauchement ou leur l’additionnalité par rapport aux engagements existants.

Un deuxième ensemble de remarques émises lors de la table ronde du Chantier n°2 de l’ADP concernait le fait qu’un nombre important de pays en développement n’ont pas encore soumis d’engagements d’atténuation ou de NAMAs. Chaque engagement volontaire ou NAMA sera accueilli très favorablement, en particulier ceux de pays en développement dont les capacités économiques sont comparables – voire supérieures - à celles de certains pays développés (moins riches), et dont la responsabilité en termes d’émissions s’accroît. Sur ce point, une évaluation technique du potentiel d’atténuation de ces actions serait utile, et en particulier, un processus visant à identifier les besoins en termes de moyens de mise en œuvre qui permettraient aux pays de présenter, puis mettre en œuvre, leurs objectifs ou leurs NAMA.
ECO se demande si l’attention accordée aux « activités complémentaires » et à la façon d’amener plus de pays à soumettre des objectifs ou des NAMA ne serait pas liée à la position réconfortante qu’elle donne aux pays développés. En effet, ce qui devrait être le troisième pilier de ce Chantier n°2, a reçu beaucoup moins d’attention : il s’agit du niveau pathétique d’ambition des pays développés, sous le Protocole de Kyoto ou en dehors.

Selon ECO, le plan de travail pour ce Chantier n°2 en 2013 doit nécessairement inclure un débat sérieux sur les engagements actuels des pays développés. De toute évidence, retirer les conditions liées aux objectifs ou aux fourchettes d’objectifs est indispensable.  Mais au final, augmenter les objectifs au-delà de l’extrémité supérieure des fourchettes sera inévitable pour que les objectifs des pays développés se situent enfin dans la fourchette de réduction de 25-40%, indiquée par la science. Certaines Parties ont noté que ce débat devra avoir lieu tout au long de 2013, à un niveau ministériel. Sans quoi, la volonté politique ne se matérialisera pas.
En cas d’échec, la crainte d’ECO est que le Chantier n°2 aient un jour un successeur nommé Chantier n°6 (six degrés) !

Les dégats sont déjà là !

En lisant le texte actuel, ECO s’inquiète qu’une possible décision à Doha puisse rater quelques points essentiels. D’abord, à la lumière du manque d’ambtion en matière d’atténuation, il y a matière à de graves inquiétudes. Ce manque d’ambition déterminera les pertes et dommages futurs. Deuxièmement, cela se passe dans le contexte d’un besoin d’action très urgent sur les fronts de l’atténuation et de l’adaptation, avec pour objectif premier de réduire au maximum les conséquences négatives. ECO espère que ceux qui ont contribué le plus au problème prendront la responsabilité de soutenir l’initiative. Troisièmement, la raison principale qui fait que les pays en développement les plus vulnérables ont placé le sujet à l’agenda est la situation désespérée qui veut que les limites de l’adaptation seront certainement dépassées dans de nombreuses régions.
S’inquiéter des impacts là où l’adaptation ne sera pas suffisante est crucial dans cette discussion. C’est pour cette raison que la convention doit faire preuve d’un leadership à développer une réponse stratégique globale quant aux pertes et dommages. Certaines des actions requises peuvent être prises via les institutions existantes, telles que le Comité d’adaptation, le Programme de travail de Nairobi ou le Groupe expert des pays les moins avancés, qui peuvent mener des activités importantes concernant les victimes et les dégâts. Mais sont-ils mandatés ou ont-ils la capacité de prendre en compte les implications plus larges qui résulteraient d’un manque d’ambition en ce qui concerne la mitigation et les victimes et dégâts associés ? Peuvent-ils s’occuper de situations telles que des pertes définitives de terres et de vies ? Ou encore s’assurer que les processus politiques pertinents fonctionnent correctement ensemble ?
ECO ne le pense pas...
ECO soutien donc l’appel de près de 100 pays en développement pour un mécanisme international sur les pertes et dommages, qui puisse être mis en vigueur en utilisant les organes déjà existants. Nous espérons que lorsque les ministres seront là, ils voudront quitter Doha avec des résultats tangibles qui montreront au monde que les peuples les plus vulnérables ne sont pas laissés seuls. Renforcer la processus de négociation dans ce domaine doit être un élément du package de Doha.

Flotter dans l’air chaud

Tandis qu’ECO n’a pas encore abandonné la perspective d’un renforcement des objectifs nationaux de réduction d’émissions, il y a une autre mesure simple qui aura un impact important ; jusqu’à 13 milliards de tonnes, en fait. Et ECO sait que les négociateurs sont pertinemment au courant que les nouvelles règles strictes, en vue d’éliminer le gigantesque surplus de permis d’émissions issu de la première période du Processus de Kyoto, feront réellement la différence. Comme nos chers lecteurs l’auront remarqué, c’est un sujet très cher au cœur d’ECO. Nous nous sommes activés à dénoncer la volonté de la Pologne, de l’Ukraine et de la Russie de se battre pour leurs droits à vendre leur air chaud, et avons appelé l’UE à ne pas s’égarer sur son chemin vers le progrès et le leadership. 

Mais ce n’est pas uniquement ces pays qui s’opposent à cet éclatement de la bulle d’air chaud.

ARRÊTEZ LES ROTATIVES ! Il semble que les discussions ont donné naissance à leur dernier groupe de (non-) négociation. Oui, ECO a entendu des rumeurs selon lesquelles il y a un groupe de membres du Protocole de Kyoto, dont l’Australie, la Norvège et l’Islande, qui serait en train de préparer une non-position concernant le surplus d’émissions. Il semble que ce groupe aurait même un nom, à défaut d’une position : le “Groupe des gardes-barrières”. Garder les barrières est peut-être une situation confortable, lorsque pour êtes entourés par l’air chaud des autres pays ?
ECO sait que les surplus UQA de ces pays ne sont pas la principale source d’inquiétude, dans la mesure où les Gardes-barrières ont le pouvoir de faire quelque chose de positif. Descendez de votre barrière et prenez l’initiative,  Gardes-barrières ! Vous disposez de plusieurs options pour faire la différence : rejoignez la position du G77 ou considérez la proposition de la Suisse, et faîtes votre choix.

Car ce vers quoi on se dirige, c’est un choix entre un gagnant-gagnant, où les Parties peuvent faire avancer les discussions et obtenir davantage de réductions d’émissions, ou un perdant-perdant qui menacerait les discussions et diminuerait les chances de renforcer la 2ème période d’engagement du Protocole de Kyoto.
Bien sûr elles ne devraient pas oublier qu’il y a une autre possibilité de rendre la 2ème période d’engagement plus efficace, en élevant le niveau d’ambition de leurs objectifs quantifiés de limitation et de réduction des émissions (QELROS).

Où sont les NAMAS des pays arabes ?

Accueillir la COP18 au Qatar offre un opportunité unique d’avancer sur les efforts de réduction et d’adaptation aux changements climatiques dans la région, de même que sur les financements climat. Voilà pourquoi ECO appelle les pays Arabes à faire preuve de leadership au-delà du centre de conférence.
ECO soutien l’appel de Greenpeace pour une collaboration est-ouest dans le monde arabe sur les sujets tels que la recherche, le financement et le développement des technologies renouvelables. Cette coopération régionale peut prendre appui sur le travail déjà réalisé par certains pays dans le domaine des énergies renouvelables, tout en développant un nouveau rôle pour les d’autres à la pointe de l’innovation technologique renouvelable.
La coopération en matière d’énergie renouvelable fera également bénéficier d’économies d’échelles et tissera de précieux liens fraternels pour faire face aux impacts climatiques de nombreux pays : raréfaction de l’eau dans des conditions climatiques changeantes pour certains, hausse du niveau des mers pour les communautés côtières.
L’atténuation passe par des efforts à la fois régionaux et globaux pour passer des énergies sales aux sources renouvelables.
ECO privilégie une approche régionale dans laquelle la diversification économique, cruciale pour la prospérité future, repose sur un développement durable de l’énergie aux niveaux national et régional - où les énergies renouvelables prenne progressivement le rôle principal dans la production. Cela implique une désaccoutumance au énergies fossiles.
Le Qatar et les Etats du Golfe ont la capacité économique de procéder à cette mutation en même temps que jouer un rôle majeur dans le financement du changement climatique. Pour des raisons d’équité, cela ne devrait intervenir dans le contexte des engagements de l’Annexe 1 pour le financement climat.
Greenpeace a démontré dans son rapport Energy [R] évolution que les pays du Moyen Orient, et du monde en général, ont la capacité de passer au solaire et aux autres énergies renouvelables, qui sont d’ores et déjà compétitives malgré les gigantesques subventions perçues par les énergies fossiles.
Pour les pays arabes, les renouvelables détiennent la clé de la souveraineté énergétique et d’une prospérité soutenable. Mais les Pays arabes ne sont pas les seuls à ne pas avoir soumis leur Action Nationales d’atténuation.

En finir avec l’impunité des subventions

Plus tôt dans l’année, ECO était ravi de voir se multiplier les soumissions soulignant le potentiel de la suppression des énergies fossiles pour contribuer substantiellement à l’ambition de réduction pré-2020. Et ECO était tellement satisfait qu’il a fait le calcul du nombre de pays qui ont fait ce genre de soumissions. Au total, plus de 110 pays ont soutenu l’appel à intégrer la réforme des subventions aux combustibles fossiles comme une option pour relever l’ambition de réduction.

Mais jeudi matin, il semblait que plusieurs Parties avaient oublié ces soumissions, seulement quelques mois après les avoir envoyé. Malgré des heures de discussion, les subventions aux énergies fossiles ne semblent pas avoir été à l’ordre du jour des discussion de du Chantier 2 de l’ADP.
Heureusement, tout les pays n’ont pas oublié cette question, et la session ADP d’hier après-midi a réservé quelques espoirs. ECO tient à remercier les Philippines, le Costa Rica et la Suisse pour reconnaître cette opportunité de réduire davantage la pollution. (ECO a également entendu dire que les Etats-Unis et le Mexique avaient évoqué la réforme des subventions à la pollution dans d’autres sessions ces derniers jours).

L’Agence International de l’Energie nous a indiqué que la suppression des subventions aux énergies fossiles pourrait réduire de moitié le fossé des réductions d’émissions entre les engagements actuels et ce qui est nécessaire d’ici 2020 pour nous permettre de limiter le réchauffement climatique à 2°C.

Bien sûr, cette suppression ne va pas être facile, mais la première étape est de reconnaître le potentiel et se mettre au travail. Premièrement, les pays riches doivent stopper leur subventions aux producteurs, et aussi vite que possible. Les pays en développement doivent être soutenu dans leur démarche pour en finir avec les subventions aux énergies fossiles de telle manière à protéger les plus pauvres et améliorer l’accès à l’énergie.

Cela fait plus de 3 ans que le G20 et la Coopération économique pour l’Asie Pacifique se sont mis d’accord pour éliminer ces subventions, et la conférence de Rio sur le développement durable, plus tôt celle année, a également a appelé à cette réforme.
La Plate Forme de Durban peut aider à renforcer ces efforts en reconnaissant que cette réforme est un bon moyen pour renforcer l’ambition de réduction pre-2020.

Les leçons pour le futur du Petit Frère

La mise en œuvre conjointe (MOC) est le petit frère, souvent négligé, du mécanisme de développement propre. Nous devons nous y intéresser. Et pas seulement parce que ce dispositif a généré des dizaines de millions de crédits, en blanchissant l’air chaud et au mépris de toute intégrité environnementale. Nous devons nous pencher sur la MOC parce qu’elle nous donne un bon exemple de ce que peut produire un mécanisme de flexibilité dont les règles sont laxistes et, qui plus est, souvent foulées au pied.
En ce moment, à Doha, les parties à la négociation imaginent une réforme de la MOC. ECO accueille favorablement la proposition d’éliminer la voie 1, grâce à laquelle les pays hôtes peuvent unilatéralement approuver des projets et générer des crédits, sans craindre le moindre contrôle international. Il était effectivement temps, car 95% des unités de réduction d’émission (URE) ont été émises grâce à la voie 1, sans le moindre souci d’efficacité environnementale.
Prenons l’exemple de l’Ukraine. Avec 69 projets enregistrés, sous voie 1, ce pays est le principal émetteur mondial d’URE. Or, 60 de ces projets ont été audités par la même entreprise, laquelle a été payée par le même… développeur. En temps normal, l’audit d’un seul projet prend des mois. Mais dans le cas ukrainien, le contrôle de l’intégrité de certaines opérations n’a pris que 7 petits jours. Rien qui puisse inspirer confiance. Leurs promoteurs n’ont entrepris de les faire enregistrer par l’ONU que depuis deux ans. Ce qui ne les empêche pas de recevoir des crédits précoces pour des abattements d’émissions réalisées bien avant l’entrée en vigueur du protocole de Kyoto. Comment ces projets pourraient-ils respecter des règles de la MOC qui ont été rédigées bien après leur mise en œuvre ?
Notre but n’est pas de mettre Kiev au pilori, mais bien de montrer les possibles dérives d’un système permettant à un pays d’émettre unilatéralement des crédits, lesquels peuvent être utilisées pour assurer une conformité carbone dans un régime mondial. En pareil cas, court-termisme et égoïsme l’emportent souvent sur la sécurité climatique.
Chers délégués, ayez tout cela à l’esprit avant d’adopter, de façon enthousiasme, un fatras de règles et de standards. La convention a besoin que les règles communes aux mécanismes de flexibilité assurent l’intégrité environnementale des projets. Ce qui est impossible avec un projet MOC, seulement contrôlé au niveau national.
Malheureusement, les règles proposées pour unifier les régimes de la MOC sont insuffisantes pour assurer l’intégrité climatique des futurs projets. Les critères d’intégrité environnementale doivent être renforcés (notamment ceux définissant l’additionnalité et ceux encadrant les règles de base). Les projets MOC non additionnels minent les buts de ce mécanisme, en particulier dans les pays disposant déjà de grosses réserves d’unités de quantité attribuée. Aussi, est-il vital que seuls des pays ayant d’ambitieux engagements de réduction d’émission puissent abriter des projets MOC.

La fenêtre de tir pour éviter la catastrophe climatique se ferme rapidement. Raison pour laquelle, nous ne devons accepter que des mécanismes produisant des réductions d’émission véritablement nouvelles et additionnelles.

Fossile du Jour

Le premier Fossile revient à la Pologne
De retour en Pologne, le ministre de l’environnement Korolec a rappelé la position de son pays pour le sommet de Doha : le report d’UQA n’est pas un problème prioritaire, contrairement à la durée et aux obligations de la seconde période d’engagement du protocole de Kyoto. Nous nous permettons toutefois de rappeler audit ministre que le report d’UQA influe sur le niveau d’ambition de ladite seconde période d’engagement. La Pologne ne veut pas renoncer à la moindre tonne de son volumineux surplus d’UQA pour contribuer à l’intégrité environnementale .
Houhou !!! Les émissions de carbone ignorent les frontières et restent le problème numéro un des négociations portant sur la seconde période d’engagement du protocole de Kyoto.

Le second Fossile est attribué à la Russie
Le vice-premier ministre russe a confirmé, mercredi, que son pays ne s’engagerait par pour la seconde période d’engagement du protocole de Kyoto. La semaine prochaine, la Russie doit annoncer ses objectifs de réduction d’émission, lesquels ne seront pas pris en compte par la seconde période d’engagement du protocole de Kyoto, à laquelle s’oppose la Russie. De ce fait, Moscou ne pourra profiter de la mise en œuvre conjointe (MOC) à laquelle elle s’efforce de participer. Ce qui sera dommageable, aussi bien pour l’économie russe que pour la réduction de sa dépendance aux… fossiles.

mercredi 28 novembre 2012

Fossile du Jour

La première place est pour le Canada qui coupe son ambition plutôt que ses émissions. Scoop ! Ça vient juste de tomber, directement du ministre de l’environnement canadien : les pays en voie de développement doivent juste prendre une grande respiration et attendre l’accord global avant d’espérer quoi que ce soit de la part du Canada en ce qui concerne le Fonds Vert. S’adressant aux journalistes hier, le ministre de l’environnement canadien a expliqué qu’il clarifierait lors des rencontres de Doha que les pays en voie de développement ne doivent pas attendre davantage d’argent pour le financement en faveur du climat de la part du Canada, parce que, après tout, « Doha n’est pas une conférence décisive ».
Merci beaucoup pour ces clarifications, cher Ministre ! Nous sommes convaincus que cette contribution va faire des merveilles pour soutenir votre incroyable crédibilité pendant ces négociations. Heureusement le ministre vient à Doha avec au moins un engagement : celui de faire augmenter la température mondiale largement au-delà des 2°C grâce à l’exploitation des sables bitumineux.
> Pour info Canada, nous essayons de limiter les émissions et augmenter les financements pour le climat pas l’inverse...

La deuxième place est attribuée à la Nouvelle-Zélande
, de nouveau, parce que non seulement Wellington a délibérément décidé de ne pas souscrire à un objectif pour la deuxième période du Protocole de Kyoto mais aujourd’hui la Nouvelle-Zélande a proposé que l’accès aux MDP soit ouvert à tout les pays indépendamment de leur soutien pour une deuxième période d’engagement. Pour dire les choses clairement, la Nouvelle Zélande a expliqué que, dans le cas contraire, le fonds d’adaptation n’aurait pas suffisamment de sous pour continuer à fonctionner. Allez les kiwis, oubliez les Hobbits et pensez à vos voisins !
Soyez sérieux… Si vous voulez votre part du gateau carbone, commencez par vous mettre aux fourneaux !


Les Etats-Unis obtiennent la troisième place
une fois encore pour rejeter de fortes mesures de réduction de gaz à effet de serre. Hier le président Obama a signé un traité mal avisé issu du Congrès, destiné à éviter que les compagnies aériennes US se conforment aux régulations européennes, pour les vols vers et en dehors de l’Europe.
Si le Congrès n’aime pas l’approche européenne, nous espérons qu’il se rende compte que la seule alternative est un agrément multilatéral fort.
Nous enjoignons Obama à rejeter toute approche fondée sur le protectionnisme, et de prendre ce traité comme un feu vert pour poursuivre un accord multilatéral fort pour le secteur de l’aviation dans son ensemble, incluant la fixation d’un prix sur les émissions de carbone, et de montrer le chemin d’un traité sur le climat global et contraignant sous la houlette de la CCNUCC.

Sécurité alimentaire au Maghreb : les oasis, une solution face aux changements climatiques

Actuellement le Maghreb, vit une période charnière. Avec un secteur agricole handicapé par de fortes inégalités et un climat aride, les Etats ont de plus en plus de difficultés à couvrir les besoins de leurs populations. La sous-alimentation croît d’années en années , poussant les pays à augmenter leurs importations et ainsi s’endetter d’avantage et accentuer leur vulnérabilité face à la volatilité des prix. De plus, les prévisions sur le changement climatique annoncent de lourdes conséquences aussi bien pour la dégradation des ressources naturelles que pour la productivité agricole. Et ce n’est pas la seule difficulté que devra affronter cette région. En effet, le contexte sociodémographique va également évoluer et obliger l’agriculture maghrébine à s’adapter à ces mutations. 

C’est dans ce contexte alarmant de la sécurité alimentaire au Maghreb, qu’apparaît la nécessité de se tourner vers d’autres modèles d’agriculture. Dans un Maghreb de plus en plus aride (plus de 75% du territoire ), les oasis apparaissent comme étant un système d’agriculture résiliente et durable qui pourrait devenir un atout dans les années à venir pour la sécurité alimentaire en s’adaptant parfaitement aux contraintes spécifiques actuelles et futures de la région.

Les atouts des oasis pour la sécurité alimentaire du Maghreb :
- Des exploitations familiales (majoritaire dans les oasis) : modèle mis en avant par les organisations internationales dans leurs actions pour le développement rural et la lutte contre la pauvreté.
- Une capacité de résilience : elle vient principalement de son mode de fonctionnement basé sur la gestion de la rareté des ressources (depuis plus de 2 000 ans) et mode d’exploitation agricole.
- Une optimisation des surfaces arables : La culture oasienne est une culture traditionnellement à étages (phoeniciculture, arboriculture, cultures maraichères ou fourragère et élevage)
- Un bassin d’emplois : Les activités connexes à la filière agricole ne sont que très peu développées, dans la plupart des cas, l’oasis est seulement productrice.
- Un atout nutritionnel : La biodiversité oasienne permet à la population de bénéficier d’un régime alimentaire équilibré.

Connaissant la situation actuelle des oasis, on peut douter de leurs capacités à agir pour la sécurité alimentaire de la région. La fuite de la main d’œuvre, le morcellement des terres ou encore les problèmes liés au droit d’eau sont des facteurs qui affaiblissent la position de l’oasis. Ainsi, le RADDO (Réseau associatif de développement durable, se mobilise pour la sauvegarde des oasis et la nécessité de mettre en parallèle deux grands domaines de politique publique :
- Une politique d’aide au développement des oasis et plus largement d’aides aux régions arides qui leur permettront d’asseoir leur position.
- Une politique alimentaire et agricole nationale, utilisant la spécificité oasienne

Réseau RADDO
www.raddo.org
> Sur ce sujet, assistez au side event du RADDO ce soir à 18h, au Pavillon Européen

Les etats-Unis en pilote automatique

Le monde entier est aujourd’hui tourné vers les Etats-Unis, dans l’expectative de voir si l’administration Obama tout fraîchement réélue, éprouvera un regain d’intérêt pour la lutte contre le changement climatique et emportera le Congrès avec elle.
Cette semaine, Barack Obama a signé un projet de loi émanant du Congrès qui permettra aux compagnies aériennes américaines d’échapper aux réglementations européennes de réduction des émissions des vols intra et extra européens.
Ce projet de loi est un coup de matraque, puisqu’il empêche de transférer de nouvelles compétences à l’administration américaine qui lui permettraient d’avancer sur ce dossier. En réalité, si une décision avait été prise, elle aurait mené à une guerre commerciale, aurait induit un coût énorme pour les contribuables, ou un arrêt brutal des négociations pour aboutir à un accord mondial. L’UE a instauré ces réglementations après avoir redoublé d’efforts pour favoriser et mesurer les réductions des émissions dans le cadre de l’OACI (l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale), l’organe des Nations unies consacré au secteur de l’aviation et ce après « 15 ans d’intransigeance et de double discours » comme le rappelait un observateur bien informé.
Mais la signature du projet de loi pourrait devenir de l’histoire ancienne, si les Etats-Unis se démenaient enfin pour obtenir un accord fort sous l’OACI afin de contrôler les émissions du secteur aérien. On observe quelques bons signaux. L’UE a accepté de suspendre sa législation pendant un an, s’ouvrant ainsi à des discussions plus constructives. Tout en approuvant le projet de loi, la Maison Blanche se disait «intéressée à contrôler les émissions du secteur aérien dans le cadre de … l’OACI.» 
Côté industrie, « la signature d’Obama est donc une preuve d’un engagement inébranlable dans la bonne direction, celle d’un accord sectoriel au niveau international ». Ce serait en effet une bonne nouvelle, étant donné qu’un accord sectoriel et mondial pour réduire les émissions du secteur aérien, possible grâce à l’instauration d’un prix sur le carbone émis par le secteur, est tout ce dont nous avons besoin aujourd’hui.  Cette mesure pourrait en outre permettre de dégager des financements conséquents pour les pays en développement, tout en répondant aux impératifs d’équité et aux principes de la CCNUCC. Mais les Etats-Unis vont-ils annoncer leur soutien à cette proposition quand M. Stern arrivera ? Les Etats Unis vont-ils révéler leurs intentions à Doha et se démener pour obtenir cet accord sous l’OACI l’an prochain?
ECO le souhaite.

Les Emirats nous impressionneraient presque !

Hier, les couloirs de la COP18 à Doha grésillaient suite à l’annonce des Émirats Arabes Unis (EAU) pendant la réunion de la Plate-Forme de Durban (ADP). L’Etat du Golfe annonçait les actions qu’il déploierait pour réduire le changement climatique. Les Émirats ont dévoilé leur intention d’ouvrir cette année une centrale solaire à concentration de 100 mégawatts, ainsi qu’une centrale photovoltaïque de 100 mégawatts.

C’est une bonne nouvelle compte tenu de l’appartenance des Émirats Arabes Unis à un groupe qui n’est pas un émetteur historique. Actuellement, le monde arabe est responsable d’une fraction du total des émissions mondiales et est toujours considéré comme un pays en développement.

Les Émirats ont déjà fait preuve de volontarisme dans le domaine des énergies renouvelables. Ces dernières années, le pays a fait montre d’efforts pour améliorer ses infrastructures dans de nombreux domaines, y compris dans le secteur des énergies renouvelables.
Beaucoup d’exemples, notamment dans le domaine du solaire (notamment un programme d’intégration en toiture), mais aussi dans la production d’énergie éolienne adapté aux conditions climatiques de la région. De nombreux projets de transport en commun, comme les métros de Dubaï ou d’Abu Dhabi sont dans les tubes.

ECO espère que cette dernière annonce à la COP18 présage de la suite. ECO reste prudent cependant, puisque les Émirats Arabes Unis ont également annoncé leur intention d’adopter l’énergie nucléaire et la capture et séquestration du carbone (CSC) afin d’atteindre ses objectifs de réduction. ECO ne tolère pas cette dernière annonce et encourage vivement les Émirats Arabes Unis à se détourner de ce chemin pour se concentrer plutôt sur leur gisement énergétique renouvelable très prometteur.

Les Émirats Arabes Unis rendrait au monde et à eux-même un fier service en s’engageant volontairement pour réduire ses émissions et en déclarant ses actions de réductions existantes. Une telle attitude validerait la bonne posture des Emirats Arabes Unis et encouragerait d’autre pays à leur emboîter le pas, notamment pour que les pays en développement s’engagent de façon contraignante.
Ce message a déjà été porté par le mouvement arabe des jeunes pour le climat (AYCM) et Greenpeace.

Cher Canada,

Te souviens-tu de l'année dernière ? Nous, oui.
ECO espérait que les bruits de couloirs étaient faux au sujet d'un retrait du Protocole de Kyoto, mais à la seconde où ton Ministre a quitté la ville de Durban, il a confirmé ton piteux abandon du seul traité légalement contraignant que nous avons. Le petit doigt d'ECO lui dit que cette histoire d'abandon de Kyoto a quelque chose à voir avec ces sables bitumineux que tu affectionnes tant, ces mêmes sables qui minent l'ensemble de tes objectifs climatiques.

ECO sait que tu es techniquement admis dans les discussions Kyoto, mais merci de ne pas toucher au micro. Lorsque tu as quitté le navire de la première période de Kyoto dans la dernière ligne droite, tu as détruit le peu de crédibilité qu'il te restait.
En principe, tu devrais rester en silence dans ton coin, comme le cancre de la classe à qui on apprend à se taire jusqu'à ce qu'il sache se comporter convenablement. Il y a des pays dans la salle qui essayent de trouver des solutions pour sortir de la crise climatique, alors merci de nous laisser tranquille.
Tu ne veux pas du Protocole de Kyoto ?
Rassure-toi, il ne veut pas de toi non plus.

Dernier appel avant l’embarquement du LCA

Aujourd’hui les Parties auront une dernière opportunité de s’atteler à question de la réduction des émissions du fret maritime et aérien ; émissions qui constituent déjà plus de 5% des émissions globales et qui augmentent plus vite que celles de n’importe quel autre secteur. Plus de 15 ans de négociations dans 3 différentes institutions des Nations Unies, la CCNUCC et les institutions sectorielles que sont l’Organisation Maritime Internationale (OMI) et l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale (OACI) n’ont pas mené loin à ce jour. La question de la mise en place de mécanismes de marchés permettant d’inciter à réduire les émissions tout en générant des fonds pour l’atténuation et l’adaptation dans les pays en développement n’a notamment pas suffisamment avancé, il en est de même pour les mesures d’efficacité dans ces secteurs.

La principale pierre d’achoppement a été la difficulté à s’accorder sur la façon de réconcilier le principe de la CCNUCC des responsabilités communes mais différenciées et des capacités respectives, avec les pratiques de l’OMI et de l’OACI, basées sur des approches globales garantissant un traitement égal de tous les bateaux et avions, partout dans le monde. Le travail technique analysant les options possibles pour mettre en place un prix du carbone dans ces secteurs est bien avancé mais l’absence d’accord sur la façon de réconcilier les différents principes à l’œuvre freine tout autre progrès.

Aujourd’hui le groupe de négociation informelle du LCA sur les approches sectorielles va étudier un texte sur ces enjeux, et une des options sur la table pourrait détenir la clef de cette impasse. Singapour a proposé un texte court et efficace qui offre une base pour l’orientation de l’OMI et l’OACI sur ces enjeux.

Les parties doivent tout simplement se mettre d’accord, ici au sein de la CCNUCC, sur le fait que les mesures de réduction des émissions de ces secteurs qui auront lieu sous l’égide de l’OMI et l’OACI doivent être mises en place via des approches globales basées sur les principes de ces institutions. Ceci en prenant en compte les principes de la CCNUCC, notamment celui des responsabilités communes mais différenciées et des capacités respectives, incluant potentiellement un signal sur la façon de faire – par exemple à travers l’utilisation des fonds levés.

Cela pourrait être une solution simple qui constituerait un grand pas en avant pour ces secteurs clefs.
Pensez-y !

Où se cache l’argent ?

Les 30 milliards de dollars qui ne font pas 30 milliards de dollars.
Les négociateurs s’en doutent sûrement, ECO s’est penché sur les chiffres pour faire un bilan (presque) final de ce qui a été décaissé en matière de financements précoces. Non seulement la majorité des financements n’étaient ni nouveaux ni additionnels, mais en plus les pays donateurs ont décidé seuls les règles de comptabilisation et quoi inclure dans leur bilan. Les Etats-Unis, par exemple, ont comptabilisé les projets de programmes de sécurité alimentaire dans leur volet adaptation, et ont compté également des crédits à l’export (qui en fait permettent de subventionner les entreprises américaines). Autre exemple, le Japon a comptabilisé des milliards de financements privés dans son engagement. ECO a beaucoup de mal à évaluer et comparer les bilans publiés par les pays. ECO comprend mieux le sentiment de frustration des pays en développement et leur appel à plus de confiance (et de financements). Pour ce qui concerne les financements après 2012, il faut plus de clarté (MRV) sur ce qui se cache derrière les chiffres. 

S’assurer que les 100 milliards de dollars fassent 100 milliards de dollars.
Heureusement, ECO voit une lumière d’espoir au bout de ce tunnel opaque. Il est possible de progresser sur deux questions à Doha. D’un côté, le LCA peut se mettre d’accord sur quels flux financiers comptabiliser légitimement en tant qu’appui à l’atténuation et l’adaptation dans les pays en développement. Cette discussion a été évitée avec soin depuis plusieurs années. La nouvelle ère des financements qui s’ouvre en 2013 ne doit compter que les financements additionnels aux efforts promis en matière d’aide publique au développement. Pour ne tenir compte que des contributions réelles des pays développés lorsqu’ils financent des prêts, il ne faut compter que la partie de dons de ce prêt. Et dans tous les cas, seulement la partie
« climat » des projets.

Dans le cas des financements privés mobilisés grâce aux financements publics, les pays ne doivent compter que ce qu’ils arrivent à démontrer. Si les négociateurs qui suivent les questions de MRV n’arrivent pas à se mettre d’accord sur cette définition à Doha, le Comité Permanent pourrait décider de ce qui peut compter ou non en matière de financements climat.

Mais la COP peut progresser ailleurs sur la transparence. Le SBSTA planche sur des formats de nomenclature communs (CTF) qui permettraient de rapporter les engagements financiers. Les nomenclatures permettraient déjà d’améliorer la transparence en attendant une définition claire des financements. Pour éviter de répéter le chaos créé par les financements précoces, ECO insiste que ces nomenclatures doivent renforcer la transparence pour reconstruire la confiance et renforcer la traçabilité de façon à ce que les pays donateurs ET pays récipiendaires puissent suivre les flux financiers. A cette fin, les nomenclatures doivent inclure les listes de projets financés, leur additionnalité à l’engagement en matière d’aide publique au développement (0,7%), les montants spécifiquement climat et la part comptabilisée en tant que don dans les prêts, garanties et autres instruments. Par ailleurs, les financements privés ne doivent pas figurer dans ces nomenclatures.
Les pays en développement ont besoin de prévisibilité en matière de flux financiers dans les années à venir. Les financements précoces nous ont montré que promettre des gros volumes de financement ne suffit pas. En éliminant les exercices de triches comptables, c’est déjà une première étape de franchie pour accroître la transparence et concrétiser les financements.

mardi 27 novembre 2012

Mettre un frein à la course à l’accaparement des terres qui affame à tout bout de champs

En parlant de climat, Doha parle également de développement. Parmi les phénomènes liés aux changements climatiques, on constate que le phénomène d’accaparement des terres s’est accéléré à la fin des années 2000 et touche essentiellement l’Afrique (62 % des transactions).
Les chiffres sont alarmants : Oxfam indique un accroissement des investissements étrangers dans des pays en développement de 200% entre mi-2008 et 2009; la Banque Mondiale estime les acquisitions effectuées en 2009 à 45 millions d’hectares, soit dix fois plus qu’en 2008; la FAO révèle qu’au cours des cinq dernières années, 50 à 80 millions d’hectares de terres agricoles dans les pays en développement ont fait l’objet d’achat ou de location. Ce qui inquiète le plus est ce à quoi les terres sont destinées :
monocultures intensives et sécurité alimentaire du pays de l’investisseur.
L’enjeu est d’arriver à définir une meilleure gouvernance foncière qui pourrait empêcher les accaparements de terres, protéger les droits des communautés rurales contre toutes les formes d’accaparement foncier et in fine, contribuer à la sécurité et la souveraineté alimentaire des populations locales.
Les négociateurs et Ministres réunis à Doha doivent négocier des politiques climatiques qui permettent d’endiguer ce phénomène. Nous attendons des pays développés qu’ils développent des politiques agricoles qui luttent contre l’accaparement des terres au lieu d’y contribuer. Nous attendons aussi que les pays-victimes du phénomène d’accaparement des terres se mobilisent sans plus tarder pour :
- s’approprier les « directives volontaires sur la gouvernance responsable des régimes fonciers, dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale » adoptées en mai 2012 par le Comité de la sécurité alimentaire mondiale et les appliquer à travers des réformes des politiques foncières.
- promouvoir la participation de tous (communautés, associations paysannes, ONG, etc.) aux processus de prise de décision relatifs à la gouvernance foncière.
- s’inspirer de l’exemple du Niger qui s’est doté d’une politique foncière originale appelée Code Rural qui reconnaît la validité des droits coutumiers. Depuis lors, les investisseurs privés ont du mal à acquérir des terres au Niger du fait de l’absence des politiques de promotion des exportations, à la différence de beaucoup d’autres pays d’Afrique.

Yaovi L. KOGBE,
Les Amis de la Terre-Togo

Pays arabes, c’est l’heure d’affirmer votre leadership

Pour la première fois dans l’histoire des négociations CCNUCC, une COP se tient dans un pays du Moyen-Orient. Le Qatar, qui appartient à cette riche région du Golfe persique, héberge la 18ème Conférence des Parties. Il y a beaucoup d’enjeux dans ces 2 semaines et le monde entier espère que la Présidence et les Parties contribueront à trouver un accord fructueux et équilibré pour l’action climatique pré et post 2020. Les pays arabes, et le Qatar en particulier, seront dans cette COP particulièrement sous les feux des projecteurs.
Cette dernière a non seulement fait émerger les questions climatiques dans la péninsule arabique, très sensible aux conséquences du changement climatique, mais a aussi stimulé le Mouvement des jeunes arabes pour le Climat (AYCM). Ce mouvement, que ECO a souvent rencontré dans les allées de la COP, interpelle leurs dirigeants ainsi : «Pays arabes, soyons leaders sur les négociations climatiques !».
Le Moyen-Orient subit les conséquences du changement climatiques avec davantage de sécheresses, des précipitations diminuées et des inondations. Ils n’ont pourtant jusqu’à présent pas engagé de changement majeur de leur politique énergétique et n’ont jamais manifesté d’intention de s’impliquer dans les négociations internationales. Le printemps arabe a mis en place des conditions favorables sur le plan social et pour l’implication de la jeunesse dans les affaires publiques. Il a également fait émerger un «printemps climatique» : beaucoup de jeunes activistes n’hésitent plus à interpeller leurs gouvernements à agir sur le plan de la mitigation et de l’adaptation afin de réduire l’impact des changements climatiques.
Le Mouvement des jeunes arabes pour le Climat a l’intention de créer un large mouvement de jeunesse à travers tout le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, avec 20 coordinateurs nationaux sur 15 pays et aspire à se faire entendre du Golfe persique à l’Atlantique. Ils s’impliquerons à Doha pour suivre et interpeller les délégués de leurs pays respectifs et organiser des évènements en marge de la COP afin d’influencer les positions nationales et internationales. Plus d’une centaine de jeunes arabes sont présents à Doha pour réhausser l’ambition de cette COP. Ils veulent que les pays arabes prennent des engagements chiffrés de réduction, s’engagent sur la période pré-2020 et contribuent à construire un accord international juridiquement contraignant afin d’assurer au monde arabe un futur climatique soutenable.

L’Australie veut enfin perdre du CO2

Tout le monde sait qu’ECO n’aime pas se montrer désobligeant vis-à-vis des Parties.
Tous conviennent, néanmoins, que l’Australie affiche sur la balance, un certain embonpoint et qu’elle doit perdre son excès de poids carbonique. Raison pour laquelle ECO s’est réjouit en entendant, il y a quelques semaines de cela, que l’Australie s’engageait à soutenir le protocole de Kyoto 2, adhérant de facto au club des Parties au régime.
Mais, chère Australie, qu’est-il arrivé à ton objectif climatique ? 99,5% de réduction des émissions de CO2 ? C’est tellement minime qu’il suffit d’arrondir un peu les angles, et hop, le tour est joué. Ne sais-tu pas que l’excès de poids en carbone est mauvais pour ta santé ? Le docteur Pnue a pourtant dit que tu dois faire fondre tes émissions de 25 à 40%. Et ton grand économiste Ross Garnaut te rappelle que le plus vite tu commenceras ta diète, le plus facile ce sera.
Serait-il possible que ton addiction aux combustibles fossiles inhibe ta volonté ?
ECO sait bien que tu en as à revendre. Mais tu disposes aussi de formidables gisements d’énergies propres qui peuvent faciliter ton sevrage.
Dès lors, que faisons-nous ? Primo, la colonne 6 indique ton objectif raisonnable de perte de poids en carbone. Secundo, il reste de nombreuses réunions durant ces deux prochaines semaines. Pourquoi ne montrais-tu pas sur une table pour crier au monde entier : « Mon nom est Australie, j’ai longtemps suivi une mauvaise voie, mais maintenant Kyoto est mon guide. Aussi, je me fixe des objectifs ambitieux que j’attendrai en respectant des règles contraignantes. »

Eclater la bulle d’air chaud à Doha ?

Les permis d’émissions non utilisés qui découleront de la première période d’engagement du Protocole de Kyoto pourraient atteindre 13 milliards de tonnes d’équivalent CO2. Cette vague d’air chaud grossit et pourrait déferler sur la deuxième période du Protocole, menaçant sa viabilité, ainsi que celle de tout accord mondial sur le climat qui serait conclu dans le futur.

ECO tient à rappeler aux délégués présents à Doha que le problème de l’air chaud est le résultat d’objectifs très faibles des pays pendant la première période. Ces objectifs se situent bien au-delà de ce que les pays avaient projetté d’émettre. La Pologne, par exemple, s’est engagée à réduire ses émissions de 6% par rapport à 1988. Cela, en dépit du fait qu’en 1997, lorsque les objectifs de Kyoto ont été fixés, les émissions de la Pologne étaient déjà environ 20% en-dessous des niveaux de 1988 ! ECO met en garde les délégués :
il ne faut ne pas croire les fausses déclarations de ceux qui prétendent que l’air chaud est le résultat d’une action climatique. Ce n’est pas vrai - et l’effondrement économique des années 90 ne peut pas conduire à hériter des droits suplémentaire vis-à-vis le processus de lutte contre le changement climatique.

Mais beaucoup ont la mémoire courte. ECO ne peut pas s’empêcher de remarquer que les Parties sont sur le point de faire la même erreur que par le passé : les faibles engagements annoncés au titre de la 2e période d’engagement du Protocole de Kyoto pourraient signifier qu’un nouvel excédent de 3 à 10 milliards de tonnes s’accumulerait à l’horizon 2020 ! Ajoutez à cela l’excédent de 13 milliards de tonnes issu de la première phase et tous les objectifs de réduction d’émissions sous Kyoto n’auraient plus d’objet. Pourtant, la Russie, l’Ukraine et la Pologne, qui sont les détenteurs des surplus les plus importants, insistent encore pour un maintien de leur droit de vendre leur air chaud. ECO a étudié la question : leurs tentatives sont vaines. Les objectifs de réduction d’émissions pour la 2e période du Protocole de Kyoto sont si faibles qu’aucun pays ne va acheter leurs surplus ! Le prix des permis Kyoto s’est d’ailleurs effondré, passant de 13 euros en 2008 à moins de 0,5 euros en 2012.

L’air chaud est tellement volumineux que, même si les pays développés devaient accroître leurs engagements en 2e période du Protocole de Kyoto, ils pourraient atteindre ces objectifs accrus simplement en achetant ce surplus de permis à émettre et sans réellement réduire leurs émissions.

Pour les participants à la COP qui sont intéressés à remettre un peu d’intégrité environnementale dans le système, ECO tient à souligner qu’ils auront besoin pour cela de faire éclater la bulle d’air chaud. Dans le cas contraire, même une augmentation par les pays de leurs objectifs actuels, dont la faiblesse est une menace pour l’humanité, ne serait pas d’un grand secours. Accroître l’ambition et mettre fin aux échappatoires sont deux mesures complémentaires. ECO suggère donc aux pays de commencer à étudier sérieusement la proposition du G77+la Chine. Cettre proposition réduit efficacement l’utilisation de l’air chaud en 2e période du Protcole de Kyoto, met fin aux transactions de permis d’émissions, et surtout annule définitivement l’excédent à la fin de la deuxième période de Kyoto.

Et à la question «est-ce utile ?», ECO répond que nous sommes maintenant sur une trajectoire d’émissions qui pourrait mener à un réchauffement de 4°C ou plus. Que les impacts associés à un réchauffement de «seulement» 2°C ont été revus à la hausse et sont désormais considérés comme « dangereux » et même « extrêmement dangereux ». Qu’un monde réchauffé de plus de 2°C menacerait l’existence même de notre civilisation, telle que nous la connaissons aujourd’hui.
Vous avez entendu parler de l’air chaud ? Il vous inquiète ? Alors foncez : éclatez la bulle d’air chaud

Fossile du Jour

La première place est attribuée à la Turquie. Bien que la Turquie soit le quatrième investisseur mondial dans le charbon, bien qu’elle détienne la plus forte augmentation relative des émissions annuelles de GES entre 1990-2010, et bien qu’Ankara ait déclaré 2012 « l’année du charbon », la Turquie demande plus de fonds dans les négociations sur le climat, et cela alors qu’Ankara n’a proposé aucun QUELROs pour la première période d’engagement. Pour rendre les choses encore plus fossilisées, la Turquie a déjà déclaré qu’elle ne prendrait pas d’engagement pour la deuxième période du Protocole de Kyoto. Cependant, ils restent invisibles pendant les négociations, afin de ne pas attirer trop l’attention. Turquie, l’heure est venue de monter sur la scène fossile !

La deuxième place du Fossile du Jour revient à l’Union Européenne pour avoir déjà à atteint son engagement de réduction de 20% d’ici 2020 et avoir jusqu’à maintenant choisi de ne pas le renforcer alors qu’il reste encore quasiment 10 ans.
 L’UE a-t-elle vraiment l’intention de ne réaliser AUCUNE nouvelle réduction de ses émissions pour les dix prochaines années ? UE - entre nous - vous devriez augmenter rapidement votre engagement ou les nuages vont apparaître et il va commencer à pleuvoir des fossiles sur votre table de négociation.

(1). Selon les dernières projections de l’Agence Environnementale Européenne, les émissions européennes domestiques avient réduit en 2011 de 17,5% par rapport à 1990. En tenant compte de l’introduction dans le marché des quotas de crédits internationaux des crédits de compensation, d’émissions du marché de quotas d’émission européen , on constate que l’Europe des 27 a bel et bien battu son objectif de -20% pour 2020 avec 9 ans d’avance !

Quel est le problème avec la Pologne ?

Le gouvernement polonais vit dans le passé. A cause de ce passé, il croit que la Pologne devrait être traitée comme un cas particulier pour toujours. C’est oublier que beaucoup de choses ont changé dans le pays depuis les années 1990.
Désormais, la Pologne est un pays développé. Mais au lieu de renforcer ses politiques climatiques pour accroître  la compétitivité nationale, le gouvernement polonais bloque toute action sur le changement climatique et menace l’avenir du pays.

Jusqu’à présent, la Pologne a fait tout ce qui était en son pouvoir pour paraître comme le «mauvais élève» de l’UE. La Pologne s’est opposée par trois fois à une action climatique plus ambitieuse de l’UE d’ici 2020 et au-delà. ECO comprend que la Pologne veut être considérée comme un pays fort de l’Union. Mais au niveau national, les autorités polonaises n’ont pas appliqué d’importantes législations européennes (par exemple sur les énergies renouvelables).

En outre, elles envisagent de construire de nouvelles centrales au charbon et des centrales nucléaires, d’ouvrir de nouvelles mines de lignite, et d’extraire du gaz de schiste. Ceci à un moment où la plupart des pays européens sont en transition vers une économie bas-carbone basée sur les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique.

Lors des négociations de la CCNUCC, le gouvernement polonais a bloqué l’adoption par l’UE d’une position unifiée et constructive sur le surplus de 13 milliards d’Unités quantitatives attribuées (UQA). Il n’a pas honte d’affirmer que seul le report total des quotas Kyoto à la deuxième période du Protocole pourra les satisfaire. Le gouvernement de Donald Tusk ne semble même pas dérangé par le fait de s’aligner avec la Russie sur cette question. ECO voudrait demander au gouvernement polonais pourquoi il insiste pour un report complet du surplus d’UQA en 2e période, puisque ces crédits auront une valeur proche de zéro au cours de la 2e période, tant la demande est faible et l’offre importante. La Pologne est-elle vraiment prête à faire dérailler les négociations internationales sur ce point ?

La Pologne veut accueillir la COP19. Mais est-elle en mesure de le faire ? L’organisation d’une COP s’accompagne de nombreuses responsabilités politiques, notamment être en mesure de participer de manière constructive l’élaboration de solutions. Organiser une COP, ce n’est pas seulement appeler les autres à agir davantage, mais aussi mettre en place une action plus ambitieuse. La Pologne n’a pas encore montré au monde qu’elle est capable de le faire. Au lieu d’opposer son veto régulièrement, le gouvernement polonais doit apprendre l’art du compromis. Pologne, es-tu prête ?

ADP SVP

Une seule année peut-elle faire la différence ?
2012 a été consacrée à raccrocher les wagons du paquet de Durban, qui, à la fin de Doha devrait former un bel ensemble comprenant un amendement au Protocole de Kyoto, la clôture du LCA et deux plans de travail sous la Plateforme de Durban (l’ADP) (et ECO ne voit aucun inconvénient à ce que des pays rajoutent de l’ambition à ce cocktail !). Aujourd’hui, la table ronde sous l’ADP va commencer à donner corps au programme de travail vers un protocole en 2015 et à ce qu’il devrait couvrir. ECO partage ici ses quelques réflexions préliminaires.
Tout d’abord, que faudrait-il faire à propos des questions non achevées sous le LCA ?
Beaucoup d’entre elles sont pertinentes pour la discussion sur l’accord en 2015. Prenons l’équité, par exemple : ECO est ravi de voir que le texte du président du LCA propose notamment un programme de travail sur l’accès équitable au développement durable, car cela fournit une bonne plate-forme pour les discussions sur les principes et les indicateurs de l’équité, un élément clé pour que l’ADP débouche sur un succès en 2015. Nous avons eu un atelier productif sur le sujet, mais il y a beaucoup à dire sur ce qu’est l’accès équitable au développement. Quels sont les principes qui doivent guider cette question ?
Et qu’est-ce que cela signifie pour les droits de propriété intellectuelle, les questions commerciales, les droits de l’homme et de nombreux autres enjeux dans la pratique ? Il s’agit d’une discussion cruciale, qui doit informer le travail de l’ADP.
La Revue mondiale de l’objectif à long terme de température mondiale est tout aussi importante et il est grand temps que les Parties s’y penchent. Il faudra un organe fort pour procéder à cette Revue mondiale, dont les résultats devront informer le travail de l’ADP.

La question des financements est omniprésente à Doha. A la COP18, nous avons besoin de décisions de la COP couvrant tous les domaines, y compris le doublement, au moins, des financements précoces pour la période 2013-2015. Nous avons aussi besoin d’un processus politique (non technique) sur l’augmentation des financements pour atteindre les 100 milliards de dollars par an promis d’ici 2020, ainsi que les sources de ces financements. De toute évidence, ce travail informera tous les futurs débats au sein de l’ADP. Enfin, les Parties devront étudier comment les différentes institutions créées dans le cadre du LCA lors des dernières COP pourraient travailler ensemble dans le cadre du nouvel accord. Par exemple, les liens entre les différents organes du mécanisme de la technologie permettront de déterminer dans quelle mesure il est capable de répondre aux besoins des pays en développement, et ces décisions exigent clairement des orientations politiques.

ECO souhaite mettre en garde les Parties, 2013 ne peut pas être qu’un forum de discussion. Certes, une phase de conception est nécessaire pour définir un plan d’action et un calendrier de travail clairs. Mais il faudra rapidement transformer ces discussions pour entrer dans des négociations très ciblées, abordant les sujets en profondeur. Nous l’avons (presque) fait par le passé ! Des présentations, des ateliers, des documents techniques, des tables rondes et un engagement continu de haut niveau sont tous nécessaires. Mais ECO attend un texte compilant les principaux éléments à la COP19. Quoi que vous pensez de nos échéances, nous vous assurons (avec la Banque mondiale, l’AIE, le GIEC et d’autres) qu’il y a surtout les échéances planétaires que l’humanité doit absolument respecter - et ces délais sont déjà passés depuis longtemps. Il n’y a plus de temps à perdre.

Tandis qu’aujourd’hui les parties discuteront du plan de travail n°1 de l’ADP (vers l’accord en 2015), ECO ne peut s’empêcher de dire quelques mots au sujet de l’ambition à court terme, parce que, nous sommes ambitieux ! Ici, l’éventail des possibilités pour accroître l’ambition avant 2020 est immense : d’une augmentation des objectifs des pays développés à de nouvelles promesses de notre hôte du Golfe et de ses voisins, en passant par un message clair envoyé au Protocole de Montréal sur les HFC, ou encore l’élimination progressive des subventions aux énergies fossiles. Il nous faut simplement mettre en œuvre ces possibilités. Il est grand temps que les Parties décident que le plan de travail sur l’ambition à court terme ne sera pas un lieu de palabres sans fin, et qu’elles énoncent ici, à Doha, un calendrier précis et des actions quantifiables.

Profitez de vos discussions d’aujourd’hui, mais nous attendons avec impatience de les voir incrites sur le papier très bientôt.

lundi 26 novembre 2012

Financements climat : Il en faut plus ! Pas moins !

Chers négociateurs fraîchement débarqués, préparez vous au bruit strident de la sonnette d’alarme que ne manqueront pas de tirer les pays les plus vulnérables au changement climatique quand ils poseront la question qui fait mal : que se passe-t-il après la fin des financements précoces fin 2012 ?
Et que fait-on maintenant qu’il n’y a plus de doute que les financements précoces auraient du s’appeler « farce-start » au lieu de « fast-start »? Pour ceux qui en doutent encore, ECO a additionné les chiffres et estime que seulement 33% des financements étaient « nouveaux » par rapport aux engagements pris avant Copenhague et que seulement 24% de l’argent était additionnel aux promesses d’aide existantes. Par dessus le marché, seulement 1/5 des financements ont financé l’adaptation, et moins de la moitié étaient du don. Il nous semble que les élus et négociateurs des pays développés doivent ressortir leurs manuels scolaires pour réviser l’équation « nouveau, additionnel, prévisible, adéquat et équilibre entra adaptation/atténuation pour faire face aux besoins croissants des pays ».

Et pour ceux qui ont besoin de visualiser les « besoins croissants », ECO vous invite à compter le nombre sans précédent de désastres liés aux impacts du changement climatique en 2012 qui – additionnés au niveau de la mer qui monte et qui salinise les systèmes d’eau douce et les terres agricoles – alourdit un peu plus chaque jour la facture de la pollution. Les 100 milliards promis à Copenhague sont de plus en plus insuffisants pour faire face aux conséquences de notre inaction…

Ici à Doha, nous nous apprêtons à tomber dans un vide financier au moment où justement nous avons besoin d’augmenter, et non diminuer, nos efforts financiers. ECO est très inquiet de voir les pays développés arriver à Doha les mains vides.


La confiance dans les 100 milliards risque de se gangrener un peu plus encore. Faut-il rappeler qu’en prenant les financements climat en otage, les pays développés mettent en péril l’accord mondial en 2015 ?

Heureusement, ECO laisse deux semaines en plus aux pays pour revoir leurs positions et…

Accroître les financements climat – ECO ne partira pas de Doha sans la certitude que les financements climat continuent et augmentent en 2013. Entre 2013 et 2015, les pays développés doivent doubler les volumes de financement public par rapport aux financements précoces, dont 10 à 15 milliards de dollars devront être dédiés au Fonds Vert au cours de cette même période.

Progresser sur les sources – pour dormir sur ses deux oreilles, ECO a besoin d’y voir clair sur la trajectoire prévue vers les 100 milliards de dollars par an promis en 2020. Progresser sur la mise en œuvre des sources de financement à fort potentiel sera clé pour prévoir des financements pérennes et à la hauteur des enjeux. Mais à condition que les pays développés y mettent plus de cœur. ECO soutient notamment la recommandation du rapport du Programme sur les Financements de Long-Terme qui appelle à créer un groupe d’experts de l’OMI, OACI et CCNUCC pour examiner différentes options de financement climat pour le transport international. ECO donnera un 20 sur 20 aux pays qui alloueront au moins 25% de la taxe sur les transactions financières européennes au Fonds Vert.

Renforcer la transparence et la comptabilisation – Avec les « farce-start », ECO a appris comment maquiller l’existant en nouveau et additionnel. Désormais, ECO souhaite compléter sa formation en comptant honnêtement et justement. En s’appuyant sur les acquis de Durban, les parties doivent s’accorder sur les formats pour rapporter et vérifier que les financements sont bien nouveaux et additionnels, et répartis de manière équilibrée entre adaptation et atténuation. Il est urgent que les financements soient rapportés de manière transparente et vérifiable.

Finalement, ECO a l’intention de ne pas lâcher sur la nécessité d’un espace politique de haut niveau pour négocier les financements après la clôture de l’AWG-LCA. Quel que soit l’espace de négociation, les financements ne peuvent être relégués au statut de question technique. Il n’y a rien de technique lorsqu’on est victime d’une catastrophe climatique. Les vies et modes de vie sont en jeu, la question des financements pour les sauver mérite d’être prise plus qu’au sérieux.

Climat et sécurité alimentaire : attention aux fausses solutions !


Garantir le droit à l’alimentation dans un monde de contraintes climatiques ?  Face à ce défi, le lancement d’un nouveau programme de travail sur l’agriculture, en débat depuis Durban, pourrait ouvrir la porte à plusieurs
« fausses solutions » :

→ La « climate-smart agriculture » : ce concept, qui mise prioritairement sur l’augmentation « durable » des rendements, néglige l’impact différencié des agricultures industrielles et familiales sur la sécurité alimentaire locale et l’environnement. Or il est crucial de rappeler que «les systèmes de production diversifiés, à petite échelle, des pays en développement offrent les meilleures perspectives d’amélioration des moyens de subsistance »  ; Alors que l’agriculture industrielle à grande échelle, avec un fort apport d’intrants externes, génère d’importants niveaux d’émissions de GES.

→ L’intégration de l’agriculture aux marchés carbone, portée par certains comme solution pour garantir l’atténuation de l’agriculture tout en mobilisant des ressources financières pour l’adaptation, est discutable tout d’abord d’un point de vue environnemental. En effet, il est très difficile de mesurer le carbone contenu dans les sols agricoles, et il est impossible de garantir que le carbone y soit stocké durablement. De plus, les grandes exploitations agricoles seront les plus susceptibles d’attirer les investissements du fait de la complexité et des coûts de développement des projets de compensation carbone.

Ce type de projets ne bénéficiera en aucun cas à  agriculture familiale, pourtant la plus vulnérable face aux changements climatiques. Enfin, cette solution risque d’encourager l’accaparement des terres via l’expansion de l’agriculture à grande échelle et la privatisation d’espaces naturels.
Face aux crises alimentaire et climatique, il  faut se concentrer sur les besoins d’adaptation et de sécurisation des petits producteurs. Le potentiel de l’agro-écologie doit également être valorisé.
A cet égard, il est essentiel de faire le lien avec les travaux du Comité sur la Sécurité Alimentaire Mondiale d’octobre 2012 sur « sécurité alimentaire et changement climatique ».
Il convient également de clarifier l’objectif et la valeur ajoutée d’un nouveau programme de travail sur l’agriculture dans le cadre de la CCNUCC (par exemple, par rapport au programme de travail de Nairobi qui aborde la question de l’agriculture sous l’angle adaptation), et de se montrer le cas échéant vigilants sur ses orientations. S’il faut privilégier une approche intégrée des enjeux d’adaptation et d’atténuation, celle-ci doit nécessairement être différenciée selon les modèles de production agricole, leur vulnérabilité et leur responsabilité en termes d’émissions (agriculture industrielle/agricultures familiales).

Sarah Fayolle (CCFD-Terre Solidaire)
et Emilie Johann (CIDSE)

Obama : le changement, c’est maintenant ?

Dans le discours qu’il a adressé après avoir été réélu pour un second mandat, le Président Obama a de nouveau soulevé l’espoir des nombreuses personnes dans du monde qui s’inquiètent du changement climatique quand il a annoncé “Nous voulons que nos enfants vivent dans une Amérique qui ne soit pas plombée par la dette, qui ne soit pas affaiblie par l’inégalité, qui ne soit pas menacée par le puissance destructrice d’une planète qui se réchauffe”. Cet espoir a continué de vibrer quelques jours plus tard lorsqu’à l’occasion d’une conférence de presse, en répondant à une question des médias sur le climat, il a dit qu’il réfléchissait à initier “une discussion nationale...” afin de voir “comment nous pouvions déterminer un agenda qui permette de recueillir un soutien des deux camps afin de faire avancer cette question... et... d’être un leader international” sur le changement climatique. Le Président Obama a semblé comprendre que le changement climatique est une question persistante, à laquelle n’a pas été apportée de réponse adéquate durant son premier mandat.
La question devient alors : et maintenant ?
Durant son second mandat, le Président Obama fera-t-il preuve d’une action ambitieuse pour réduire la menace que le changement climatique fait peser sur les États-Unis et le monde, en opérant la transition de l’économie américaine vers le zéro-carbone, et fera-t-il de la question une pièce maîtresse de la politique extérieure américaine ?
Dans la prolongation des conséquences de l’ouragan Sandy ainsi que de la sécheresse, des feux de forêts et des autres événement climatiques extrêmes qui ont affecté les États-Unis durant la dernière année, il est clairement temps pour le Président Obama de procéder à une remise à zéro de sa politique climatique, au niveau national autant qu’international. 

Tout d’abord, le monde doit entendre ici à Doha de la part du Président et de son équipe de négociation qu’ils restent complètement engagés à maintenir l’élévation du niveau global des températures largement sous la barre des 2°C - ce qui reste non seulement possible mais même essentiel - et que les États-Unis vont s’affirmer comme le leader de cet effort collectif.
L’administration devra alors clarifier comment elle compte atteindre son objectif actuel de réduction de 17 % des émissions américaines. Alors que ces dernières diminuent légèrement, à la fois du fait des politiques en faveur des énergies renouvelables et de la sobriété énergétique des véhicules, et du fait de la baisse drastique des prix du gaz naturel qui ont réduit l’utilisation du charbon pour la production d’électricité, il est peu probable que, sans une réglementation ou une législation plus contraignante, l’administration Obama parviendra à mettre les Etats-Unis sur la voie de la quasi-suppression des émissions qui est appelée par la communauté scientifique pour la moitié du siècle.
Enfin, les délégations présentes à Doha doivent entendre que les États-Unis restent volontaires pour remplir leur part des engagements de Copenhague de mobiliser 100 milliards de dollars annuels pour les financements climat d’ici à 2020, ainsi que pour annoncer quelles innovations financières l’administration est prête à soutenir pour atteindre cet objectif.
Ces quatre étapes constitueront un long chemin pour ré-initialiser la polique climatique des États-Unis. Elles prouveraient qu’au lieu de niveller le monde par le bas au niveau de ce qui est (ou n’est pas) possible aux États-Unis, le Président Obama et son équipe vont élever leur action au niveau de ce que la science et le monde exigent pour éviter un changement climatique catastrophique.

Un dernier point pour finir : chaque entraîneur sait que lorsque votre équipe est menée de plusieurs buts à la mi-temps, un changement de tactique n’est peut-être pas suffisant ; il est peut-être aussi temps de procéder à quelques changements de joueurs.

Fossile du Jour

Le première place du Fossile du jour est décernée aux USA, Canada, Russie, Japon et Nouvelle-Zélande pour leur refus de s’engager dans un cadre multilatéral juridiquement contraignant. Pour les Etats-Unis - sérieusement, surmontez votre
« exception  américaine » et acceptez les règles communes de comptages déjà décidées. Canada, il nous est très difficile de trouver des mots diplomatiquement corrects dans ce Fossile du jour pour décrire votre attitude, mais reprenons-nous - se retirer du Protocole de Kyoto est totalement inacceptable et votre objectif est une insulte aux plus vulnérables. En ce qui concerne le Japon, la Russie et la Nouvelle-Zélande - vous avez encore une chance de soutenir des règles juridiquement contraignantes et de vous engager sur des objectifs ambitieux pour la deuxième période d’engagement (ce qui signifie pas de report de l’air chaud, Russie). Nous cherchons à avoir de vos nouvelles d’ici la fin de la semaine, parce que franchement, voulez-vous être cantonné à ce groupe à faible ambition ?

La seconde place du Fossile revient à la Nouvelle-Zélande. Contrairement à son voisin de l’Ouest, la Nouvelle-Zélande a décidé de ne pas se fixer d’objectif contraignant pour la deuxième période d’engagement, en invoquant des prétextes fallacieux alors que la réalité est toute simple : ce pays fait preuve d’une grande irresponsabilité. Ce sont ses partenaires des îles du Pacifique qui devraient réfléchir à deux fois avant de faire confiance à nouveau à la Nouvelle-Zélande !

Le Rayon du jour nous arrive de l’Union Européenne (UE) pour avoir déjà atteint son objectif de 2020, près de 10 ans en avance !
Elle est vraiment la plus rapide des sous-performants du Protocole de Kyoto ! Mais attendez !? L’UE nous a dit qu’elle n’avait pas l’intention d’augmenter son objectif, déjà atteint, de 20% de réduction des gaz à effet de serre pour 2020. C’est scandaleux! L’UE a-t-elle vraiment l’intention de ne réaliser AUCUNE nouvelle réduction de ses émissions pour les dix prochaines années ?
UE - entre nous - vous devriez augmenter rapidement votre engagement ou les nuages ​​vont apparaître et il va commencer à pleuvoir des fossiles sur votre table de négociation.

dimanche 25 novembre 2012

Sur la route de l’ambition

L’équité est-elle sur le parcours de l’ambition ? ECO clame qu’elle ferait bien de l’être.  Sans cela, rien ne marchera ou ne marchera assez bien.  Sans équité, c’est toute l’histoire de la transition bas carbone et résiliente qui serait trop faible, trop tardive. Et comme les scientifiques semblent vouloir nous dire – voir le récent rapport Turn Down the Heat de la Banque Mondiale -  il semble que l’histoire finisse assez mal.

Comme dirait La Palisse : l’équité sera sur le parcours de l’ambition ou bien ce sera l’inéquité, dressée devant nous comme un mur infranchissable. Nous voyons bien comment cela se passe. Les Etats-Unis - tout en assurant qu’ils en ont fini avec les politiques stériles issues d’une opposition obsolètes Nord / Sud - ont réussi à siphonner la responsabilité commune mais différenciée (RCMD)  (et RC) de tous les textes officiels.

Mais quels sont les effets ? Pour l’écrasante majorité des Parties, l’absence de l’équité confirme l’évidence. Le texte de la Convention s’applique. Les États-Unis ont-ils noté que les actions provoquent des réactions ?
Le chef de la délégation américaine a rejeté les Annexes, les considerant “anachroniques” et a appelé à « la différenciation d’un continuum, chaque pays devrait agir vigoureusement en fonction de sa situation en constante évolution, des capacités et des responsabilités». C’est une bonne idée, mais malheureusement il souffre de son association aux agressifs efforts des Etats-Unis à détruire Protocole de Kyoto. En arrivant à Doha, ECO peut se demander si cette regrettable situation est sur le point de changer. Avec la réélection du président Obama, il y a une chance pour réinitialiser la stratégie internationale de Washington, la tactique et le personnel. Il n’y aura pas beaucoup plus de chances avant 2015. 

En même temps, la question est entendue. Le régime ambitieux, mondial et fondé sur des principes dont nous avons besoin ne peut venir que par le biais d’une application créative des principes de la Convention, la responsabilité commune mais différenciée selon les capacités respectives étant le premier d’entre eux. Alors oui, M. Stern, nous avons besoin d’une approche dynamique, une approche qui prenne pleinement en compte l’évolution des réalités de ce monde déjanté et dangereux. C’est-à-dire que nous n’allons pas réussir sans une vision du dynamisme qui puisse être considérée comme entièrement juste, tant du point de vue de la procédure que de l’équité.


Où en sommes-nous ? Dans une situation désespérée dans laquelle tous les pays riches doivent rapidement remplir leur contrat pour combler le fossé des émissions. Heureusement, cet objectif peut être accepté politiquement et juridiquement dans les limites des accords et traités existants, mais uniquement si les Parties négocient de bonne foi. En particulier, les engagements existants - pour atténuer et soutenir l’atténuation et l’adaptation des autres - doivent être remplis. A plus long terme, un nouvel accord sera nécessaire, un accord plus difficile que nous n’allons pas réaliser sans un engagement clair et politique de faire de
« l’accès équitable au développement durable »
quelque chose de réel et de concret. Ceci, à son tour, nécessitera une négociation solide sur des approches créatives et fondées sur des principes pour partager les coûts et opportunités mondiales à long terme de l’atténuation et de l’adaptation.

Il est encore temps de lancer la plateforme de Durban avec des  ambitions élevées et une vision coopérative. Mais, franchement, il ne reste plus beaucoup de temps. Ce qu’il nous faut maintenant, c’est du courage et un réel sens de l’état. L’administration Obama, pour sa part, doit commencer à négocier un régime qui soit suffisamment juste pour pouvoir fonctionner dans les faits. Et les négociateurs du G77, eux aussi, doivent faire mieux. Lorsque les ministres des pays BASIC ont appelé dans leur déclaration de septembre à « un effort international accru pour une mis en œuvre à partir de 2020, sous la CCNUCC, qui respecterait les principes d’équité et de responsabilités communes mais différenciées ainsi que la différenciation entre l’annexe 1 et non-annexe 1 », ils ne montraient pas vraiment une grande ouverture à de nouvelles approches de la RCMD/CR. Compte tenu de la situation actuelle, leur réticence est compréhensible, mais il ne suggère pas le genre de leadership dont nous allons avoir besoin dans les années à venir. Peut-être qu’après Doha, un tel leadership sera enfin à l’ordre du jour.

Des négociations difficiles nous attendent. Comment les organiser au mieux ?
L’équité est un sujet est suffisamment important pour avoir sa propre voie de négociations. Mais si cela n’est pas possible, nous sommes convaincu que les voies de la vision partagée ou de l’ambition, ou les deux, lui permettront, se ferait un plaisir de lui faire une place sur le théâtre des négociations. D’une façon ou d’une autre, le débat se tiendra et personne ne serait assez stupide pour en minimiser l’importance.
Voici quelques conseils gratuits : parlons des principes d’abord et après s’être mis d’accord sur les fondamentaux (par exemple : les points indispensables sont l’ambition, la capacité, la responsabilité et les droits des pauvres au développement durable), nous serons en mesure d’aller de l’avant sur la question de l’équité: partir des principes pour aboutir à des accords cohérents et réciproques.

La situation ne sera pas simple à résoudre. Mais il n’y aura pas de vrai confiance ou de mouvement en avant tant que la problématique de l’équité n’aura pas été reconnue et respectée comme un élément fondamental de cette négociation. Et - a-t-on encore besoin de le dire - tant que des progrès conséquents ne seront pas obtenus sur le terrain du financement également car c’est là seulement que pourront se matérialiser les beaux discours et les belles propositions. La bonne nouvelle c’est que dans tous les cas, c’est une décision qu’il n’appartient qu’à nous de prendre.