mardi 30 novembre 2010

Les ingrédients du paquet

Lors de la plénière de la COP, de nombreuses Parties ont commenté les records de température et les évènements extrêmes de cette année. Cela survient alors qu’ECO rend compte des travaux récents de la Royal Society consacrés à un monde qui se dirige rapidement vers un réchauffement de +4°C… scénario qui résulterait d’un manque d’ambition. La nécessité d’une action radicale d’atténuation n’a jamais été aussi claire.

Ceci nous amène au LCA. ECO se félicite des travaux menés cette année par la Chair pour trouver un consensus. Dans un esprit de soutien mutuel, nous formulons les recommandations suivantes aux éléments apportés par la Chair. La vision partagée doit préserver la planète pour les générations futures. Limiter le réchauffement à 1,5°C est nécessaire pour éviter des conséquences graves, comme la perte de la barrière de corail mésoaméricaine, dont une parte se trouve au large des côtes de Cancún. Cette barrière est la seconde au monde par sa longueur et héberge une biodiversité inestimable. Les Parties doivent s’accorder sur un seuil de 1,5°C, s’engager dans un processus qui examine cet objectif et convenir d’un pic mondial des émissions en 2015 au plus tard. S’arrêter à la seule préparation d’un examen scientifique en 2015, proposée aujourd’hui, ne serait pas un appel à l’action mais le gaspillage d’une opportunité unique.  La partie finances est utile pour simplifier le texte et identifier des compromis malgré un manque de certains éléments cruciaux comme un juste équilibre entre financement de l’atténuation et de l’adaptation, ainsi que la participation des populations vulnérables, de la société civile et des femmes. Et pourtant, c’est une base très prometteuse. Améliorée, elle peut ouvrir la voie à une décision substantielle pour créer un nouveau fonds sous la COP, établir un organisme de surveillance efficace ainsi qu’un processus pour décider sur les sources de financement, incluant les sources innovantes de finances publiques. Hélas, le texte sur la technologie n’assure pas que les mécanismes relatifs à cette dernière soient placés sous l’autorité de la COP et responsables devant celle-ci. Cela affaiblit l’objectif d’une mise en place de l’architecture de coopération à travers les Comité exécutif de Technologie et les Centres d’excellence technologique, faute de propositions de mécanismes multilatéraux basés sur des règles. Cela permet aussi l’émergence d’un ensemble d’arrangements ad hoc avec un rôle de premier plan pour la Banque mondiale et les banques régionales de développement. Soyons clairs, ces banques financent toujours les combustibles fossiles plutôt que les économies d’énergie, l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables. Même les entreprises énergétiques des Etats-Unis sont sceptiques quant au rôle de la Banque mondiale. Comme d’autres, elles bénéficieraient davantage d’arrangements institutionnels qui soient clairement sous la direction de la COP. La note du chair passe complètement à coté de la proposition CAN en ce qui concerne le « renforcement de capacité ». Le texte ne prend pas en compte la proposition d’un panel technique. Ce serait pourtant la fenêtre vers l’élaboration d’un programme de renforcement de capacité qui serait nouveau, effectif et intégré et financé par de nouvelles ressources. Sans ce panel, cette fenêtre ne peut exister. En outre, a aussi disparue du texte l’obligation pour les pays développés de fournir des ressources nouvelles et additionnelles pour soutenir le renforcement des capacités. La création d’un cadre de mise en œuvre fort pour l’adaptation est à la fois cruciale et hors de portée.      


Si le texte n’est pas parfait, il permet néanmoins de poser les jalons i) pour un processus post-NAPAs pour les PMA et ii) pour les pertes et dommages. Le texte demande aussi une décision concernant le Comité d’Adaptation mais reste faible concernant le financement d’actions d’adaptation, alors que les deux sont liés. ECO est aussi soulagé de voir que toute référence aux response measures a été retirée du texte.
Il est ironique de voir que nous n’arrivons pas à progresser sur le sujet de l’atténuation, alors que c’est l’élément le plus important de tout accord sur le climat. Le texte de la Chair propose un cadre très général et succinct des délivrables de Cancún, alors qu’il faudrait se mettre d’accord sur des éléments spécifiques. Ces éléments pourraient comprendre la création d’un registre pour suivre les actions et fournir un soutien financier, la prise en compte de l’écart de gigatonne qui existe entre les objectifs et le niveau d’action, le processus pour combler cet écart, et la préparation de plans d’actions neutres et sobres en carbone. Vu la complexité des problèmes liés aux mécanismes (de marché et hors marché), la suggestion du chair d’établir un processus formel pour examiner ces problèmes apparaît sensée. Dans les principes de l’annexe V, le langage  a été affiné en passant “d’aller au-delà de la compensation” à « réduction nette dans les émissions de GES globales » et « lutter contre le double comptage » des émissions. Cependant, les parties doivent garder à l’esprit qu’il n’y a pas de place ni de besoin de compensation, vu les engagements très faibles des pays développés.  Le texte sur le MRV reste une page blanche. 36 mots seulement pour un enjeu qui bloque tout progrès sur l’ensemble de la négociation. Un système de MRV robuste est crucial pour l’intégrité environnementale mais doit aussi être équitable. Des enjeux importants comme des standards communs de comptabilisation pour les pays annexe 1, des modalités de soutien MRV dans les communications nationales et l’approche différenciée pour la vérification d’actions volontaires/non-financées doivent être abordés à Cancún. Sans oublier que la transparence est de mise pour le processus-même du MRV, qui doit garantir l’accès à l’information et la participation publique. Et sans oublier non plus qu’il faut aider les PED à renforcer leurs capacités nationales de MRV.
Enfin, le texte reste muet sur la forme légale du délivrable final du LCA. Les parties vont devoir se poser la question bientôt, puisque celle-ci est étroitement liée à celle de la deuxième période d’engagement sous le protocole de Kyoto. En outre, le texte se tait sur le futur du mandat du LCA. Afin de progresser vers un accord juridiquement contraignant, équitable et ambitieux, il est important de comprendre comment vont procéder l’AWG-KP et l’AWG-LCA  après Cancún. Chers délégués, ECO vous demande de boucher les trous dans votre gruyère de texte si vous voulez obtenir le paquet politiquement équilibré dont vous n’arrêtez pas de parler.

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